vendredi 28 février 2014
jeudi 20 février 2014
Sommaire
Introduction
I/ Un modèle de société remis en cause
II/ Des inégalités sociales
III/ Un idéal politique controversé
Conclusion
mercredi 19 février 2014
Introduction
Le roman peut être un instrument précieux au service de l'engagement de l'auteur et doit donc être perçu comme tel et non comme un simple témoignage objectif sur l'histoire de la société. Nombreux sont les romanciers qui ont ainsi défendu une cause qui leur tenait à cœur à travers les histoires de personnages de fiction. Ici, le personnage pivot du récit constitue l'outil principal véhiculant l'engagement. Les auteurs du XIXe et XXe siècles se l'approprient personnellement afin de partager leur(s) combat(s) contre les injustices de leur époque. En effet, ils établissent une critique envers leur société que ce soit à propos de son modèle remis en cause, des inégalités sociales toujours présentes ou bien encore d'un régime politique dont les bienfaits restent toujours incertains. C'est pourquoi nous avons décidé de vous présenter une étude axée sur la fonction du personnage de roman à travers l'engagement de l'écrivain.
Si les auteurs du XIXe tels Victor Hugo et Emile Zola entreprennent une lutte contre les injustices sociales, George Orwell quand à lui dénonce l'essor du communisme de Staline ayant engendré le régime totalitaire de l'Union des Républiques Socialistes et Soviétiques.
Nous pouvons alors nous demander dans quelle mesure le personnage est-il représentatif de l'engagement de l'auteur ?

Si les auteurs du XIXe tels Victor Hugo et Emile Zola entreprennent une lutte contre les injustices sociales, George Orwell quand à lui dénonce l'essor du communisme de Staline ayant engendré le régime totalitaire de l'Union des Républiques Socialistes et Soviétiques.
Nous pouvons alors nous demander dans quelle mesure le personnage est-il représentatif de l'engagement de l'auteur ?
mardi 18 février 2014
I/ Un modèle de société remis en cause
Le
XIXe siècle est marqué par l'apparition d'une nouvelle classe sociale : la
classe ouvrière.
Cette
classe ouvrière dominé par la bourgeoisie provinciale est l'illustration même
d'une société délaissée vivant dans des conditions épouvantables.
La
société minière est sûrement la plus atteinte du XIXe siècle , en effet du
nourrisson à l'adulte tous connaissent une vie de dur labeur sans retour
financier adéquate à leur travail difficile.
En
effet durant le second Empire le monde ouvrier a une prise de conscience sur sa
situation, Cette société connait les réformes dont elle peut bénéficier ainsi
que ces droits, Le secteur ouvrier semble reconnaître la précarité de leurs
vies ainsi que de leurs logements qui ne constitue en général une seule pièce,
En effet , pour une famille ouvrière de cinq enfants une seule pièce et un
point d'eau sont présents, C'est dans ce secteur que la mortalité infantile est
la plus forte dues aux différents travaux qu'ils doivent supporter, Comme
l'accrochage et décrochage des berlines, etc. Les techniques sont rudimentaires, les risques d'accidents sont dangereux et l'hygiène encore peu présente.
Sous
le second Empire plusieurs mutations rapides engendrées par la prospérité et
l'exode rural ont touché les cadres de vies , notamment des tensions entre les
classes , un fossé se creuse entre lieu de travail et domicile particulièrement
pour la classe bourgeoise qui tient à s'éloigner de la classe ouvrière . Pour
conclure une situation politique en crise et la montée du mouvement ouvrier
fait resurgir une peur sociale au sein de la bourgeoisie.
Ainsi dans ce contexte de lutte sociale
de la classe ouvrière que Zola place son treizième volume des Rougon-Macquart Germinal.
Le
roman se situe vers 1865 sous l'Empire autoritaire, cette époque est la
naissance des mouvements socialistes et des grèves, A travers toutes ces
révoltes de l'Empire , les différentes péripéties de Germinal illustrent les soulèvements des salariés donc
la lutte du Capital et du Travail.
Zola
Émile
Zola ( 2 avril 1840 au 29 septembre 1902) écrivain naturaliste, connu pour sa fresque romanesque de vingt volumes a mis en scène la
trajectoire d'une famille à travers différentes générations dont chacun des
protagonistes fait l'objet d'un roman.
Cet
auteur aussi célèbre pour son travail minutieux et méthodique comme il le
précise lui même dans cette citation :
«Ma façon de procéder est
toujours celle-ci: d'abord je me renseigne par moi-même, par ce que j'ai vu et
entendu; ensuite, je me renseigne par les documents écrits, les livres sur la
matière, les notes que me donnent mes amis; et enfin l'imagination, l'intuition
plutôt, fait le reste. Cette part de l'intuition est chez moi très grande, plus
grande, je crois, que vous ne la faites. Comme le disait Flaubert,
prendre des notes, c'est être simplement honnête; mais les notes prises, il
faut savoir les mépriser.»
L'écrivain
commençait la rédaction de ses œuvres en deux
étapes , tout d'abord un dossier préparatoire où plusieurs réflexions
théoriques sont écrites ensuite de divers brouillons.
Zola
nous fait part de son engagement déterminé
pour cette société minière notamment par son roman mais aussi par toutes
ces démarches entreprises avant la réalisation finale de Germinal,
En
effet l'écrivain avait préparé un dossier volumineux de plus de neuf cents
soixante deux feuillets , il était le compte rendu de ses multiples visites des
mines d'Anzin , toutes ces discussions et réunions du Parti ouvrier, Il a donc
réalisé plusieurs investigations notamment des recherches scientifiques sur le
monde et le fonctionnement de la mine, Il aussi pris connaissance de divers
ouvrages et articles de journaux sur le monde de la mine , des problèmes
économiques contemporains et des gréves du socialisme,
Sur
ce thème , l'auteur s'est entretenu avec le peintre Roll de la toile La
Gréve des mineurs. Du 23 février au 03 mars 1884 , Zola enquête à Anzin
, dans les mines de charbon en pleine gréve pour l'écriture de son roman
Germinal.
Suite à cela Germinal peut être perçu
comme un documentaire ou une retranscription directe des révoltes du monde de
la mine,
Zola
présente la genèse de Germinal :
«
J'ai toujours, dans la série des Rougon-Macquart , gardé une large place à
l'étude du peuple , de l'ouvrier, et cela dès l'idée première de l'œuvre. Mais
ce n'est qu'au moment de L'Assommoir
que, ne pouvant mettre dans ce livre l'étude du rôle politique et
surtout social de l'ouvrier, je pris la résolution de réserver cette
matière,pour en faire un autre roman .Et, plus tard , ce projet s'est précisé ,
lorsque je me suis rendu compte du vaste mouvement socialiste qui travaille la
vielle Europe de façon si redoutable .Le cadre d'une grève s'est imposé
naturellement à moi comme le nécessaire, Germinal est donc le complément de L'
Assommoir, les deux faces de l'ouvrier.»
Cette
œuvre du second Empire peint une société
victime d'un travail hargneux, de problèmes financiers , de logements miteux et
en proie à un fort alcoolisme.
Tout d'abord le titre Germinal évoque l'une
des grandes journées révolutionnaire le douze germinal an III ( 1er avril 1795
) durant laquelle le peuple réclame du pain en envahissant la Convention, Une
atmosphère de révolte c'est ce qu'a choisi l'auteur comme référence à son
roman,
Germinal publié en 1885 met en
scène et sacralise les luttes sociales de la fin du second Empire dans le
milieu ouvrier de la mine au nord de la France,
Ce
récit met en contraste la famille Maheu
une famille pauvre à celle de la famille Grégoire riche famille de la
bourgeoisie provinciale,
Cette
opposition est marqué durant tout le roman, Ainsi diverses catastrophes
accablent toujours la même famille , celle des époux Maheu et leur sept enfants , intensifiant alors leur côté
dramatique,
L'action du roman se situe entre mars 1866 et avril 1867 à Montsou, dans le Nord de la France. Zola va manifesté son engagement pour le monde ouvrier à travers le personnage d'Étienne Lantier. Il est le protagoniste de l'œuvre , fils de Gervaise et demi-frère de Nana , est engagé comme mineur au puits du Voreux. Ce personnage est tout d'abord extérieur au milieu minière et aussi un ignorant qui va poussé à la révolte . En effet , acquis au syndicalisme et aux théories socialistes, il prend l'initiative de créer une caisse de secours pour tous les mineurs.
Lantier
Lantier
apprend progressivement un métier se découvre une passion et finit
par
se former comme un militant ouvrier.
Son
arrivée et son départ délimite le cadre spatio-temporel du roman.
Il
donne alors à Germinal la dimension d'un roman d'apprentissage.
Individu
et personnage collectif, son aventure est à la fois une formation personnelle
et une prise de conscience générale. Ainsi grâce au personnage d'Étienne
Lantier , l'auteur dévoila sa vision du monde ouvrier. En effet, à travers le
regard du personnage on se rend compte que le travail pour la classe ouvrière
est représentée comme un mode de survie et d'éthique. On peut comparer l'auteur
et son protagoniste , car tous deux sont extérieurs aux conditions précaires
qui touchent les mineurs puis de part leurs idées et leur engagement ils se
battent pour faire valoir les droits d'une société. Avec la mise en place de
grèves et de révoltes .La comparaison entre l'incipit et l'épilogue démontre la
maturation d'Étienne en symbiose avec la nature en plein renouveau printanier
or son arrivée s'était déroulée dans un cadre sombre en pleine mine active.
Cette fin où Lantier est survivant d'un accident dans la fosse préfigure celle
du peuple qui sera délivré de sa misère.
Ainsi
Zola représente la sortie de la mine du héros «les cheveux tout blancs» pour
symboliser que riche de son expérience il peut désormais s'attaquer à d'autres
révolutions.
On peut donc conclure que la fin du roman est
tourné vers le futur et que Zola a rempli sa mission assignée lors de la
préface de L'assommoir, écrire sur le peuple non pour traiter un sujet
exotique mais pour dénoncer les méfaits du Capital et montrer la nécessité d'un
monde meilleure.
Germinal restera l'œuvre la plus
connue de Zola et graver à jamais dans les mémoires de toute une génération.
L'illustration même de sombres mineurs déclenchant une gréve meurtrière et
sanglantes pour améliorer leur épouvantables conditions de vie et de travail. A
la mort de l'auteur, le peuple défila sur sa tombe tandis qu'un groupe de
mineurs scandait le cri de «Germinal» «Germinal».
Aujourd'hui plusieurs hommages sont rendus à
cette œuvre notamment le film de Claude Berri , GERMINAL dont voici la bande annonce, parfaite représentation du cadre de l'histoire.
lundi 17 février 2014
suite
En 1948, Georges
Orwell, dans son roman 1984, décrit la vie de Winston Smith, après
l’implantation de l’ère nouvelle soumise au régime totalitaire. Il a voulu
montré le pire prototype d’un régime de ce type, poussé aux excès. L’auteur
anglais est témoin des pires périodes de son siècle dont l’implantation des
régimes totalitaires nazi et soviétique. L’ancrage de ce dernier est son
inspiration pour cette œuvre. En effet en URSS, Staline est à la tête du parti
unique communiste qui prône ses bienfaits alors que le seul objectif est le
pouvoir. Le totalitarisme soviétique se singularise par le culte de la
personnalité de Staline. Chaque forme de communication est mis en œuvre pour
glorifier le chef et rendre ses actions comme bienfaisantes. A la différence du
totalitarisme nazi par exemple, le stalinisme pense que tout est dans les
esprits. La propagande est le symbole de l’emprise sur le peuple. On décide de
changer les pensées et rééduquer le peuple. Dans 1984, le même principe
est souligné mais en creusant tellement loin que le thème principal en est la
contre-utopie.
Orwell
C’est trois années
après la seconde guerre mondiale que parait le roman futuriste 1984. Trois
années en effet où les esprits ont pris conscience de l’atrocité du contexte
guerrier présent à travers le monde. Cette moitié du XXe siècle s’est vu ravagée
par deux guerres mondiales qui ont changé les êtres et leurs mœurs. Ce
changement de mentalité s’observe sur tous les domaines, ainsi, la vie
politique a étendu son influence sur des populations ravagées moralement et a désormais
évoluée laissant place à la venue d’idéologies extrémistes. Vaincre le mal par
le mal, telle est l’idée synthétisant les deux grandes nouvelles idéologies
totalitaristes de ce siècle. Après l’horreur guerrière (1914-1918) et la
décadence prépondérante des nations au fils des années, les peuples n’ont
confiance qu’en un système fort, puissant, assurant la survie et la renaissance
des hommes. De ce fait, les
totalitarismes nazisme et soviétique se développent sur la période
d’entre-deux-guerres, n’admettant qu’un parti unique et aucune opposition. En
plus d’être des dictatures, ils se singularisent par l’omniprésence de l’état
dans la vie du peuple, instaurant ainsi une manière de penser, l’idéologie. Ils
seront l’inspiration majeure de notre roman. Cependant, l’œuvre se penche plus
sur le régime totalitaire de l’URSS, toujours présent au sortir de guerre.
Alors que l’Allemagne nazie a été vaincue, elle est dirigée par les
vainqueurs : les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France qui permettent
ainsi sa renaissance basée sur d’inédits principes démocratiques. Au contraire,
le totalitarisme soviétique est à son essor. L’URSS possède de même une partie
de l’Allemagne qui est menée dans une toute autre façon, en instaurant des
fondements cette fois-ci, communistes. L’Union s’est étendue à travers l’Europe
de l’Est et fait régner son régime totalitaire sur un plus grand territoire.
Ainsi, Orwell a décidé de se pencher sur ce cas afin d’envisager l’évolution
d’un tel totalitarisme en 1984. Il s’inquiète en fait du futur du dernier totalitarisme
encore actif au monde car l’œuvre futuriste évoque la notion de modernité des moyens
mis en œuvre pour contrôler la population sur tous les points, ce qui mettrait
en péril les libertés humaines. Les techniques de prise de pouvoir sur le
peuple soviétique ont été des éléments majeurs à l’implantation du
totalitarisme. En effet, l’enrôlement est la mise en confiance de la population
face à l’idéologie obligatoire. L’état soviétique a tout d’abord usé de la
propagande : cinéma, affiches, chants, organisations, parades… tout était
créé avec une visée patriotique. La recherche d’innovation permet même
l’utilisation du photomontage aidant à la suppression des mis à morts du parti
communiste sur les dossiers et photos.
Exemple :
élimination de Trotski, ancien bras droit de Staline
Cet exemple
illustre le progrès du régime afin de prôner la perfection du parti unique :
la présence d’aucun ennemi au sein de l’Union affirme sa perfection et ses
bienfaits. Cette étape est décrite comme franchie à travers le roman. En effet
le culte de la personnalité du chef du parti communiste, Staline, a inspiré
l’état idéalisé de l’œuvre. Orwell
s’attache plutôt à l’étape suivante qui consiste à contrôler rigoureusement les
sujets et à éradiquer chaque personne menaçant l’ordre établi. En URSS, la
police de l’état, la NKVD assure l’autorité, notamment lors des Grandes Purges,
période d’extermination des opposants réels ou perçus comme menaces du parti
communiste ; elle fera en tout plus de 3 millions et demi de victimes. L’Union
soviétique se montre comme utopie alors qu’elle est tout autre. Elle ne
souhaitait pas radicalement exterminer les obstacles, mais avait pour but de
rééduquer leurs esprits tout en usant de leurs travaux pour l’Etat dans les
goulags. Ces camps de travail principalement situés en Sibérie laissaient une
mince chance de survie pour les condamnés (dures conditions de vie :
froid, maladies, pénuries etc). L’auteur a ainsi fait de son monde futuriste,
une dystopie (contre-utopie ; monde fictif qui bannit le bonheur) parfaite
tout comme le régime totalitaire soviétique l’était. En 1948, lors de la
parution du roman, l’Union soviétique et son système sont toujours d’actualité.
Encore plus puissante du fait de sa politique d’expansion lors de la seconde
guerre mondiale, elle construit autour d’elle une alliance communiste qui
s’oppose aux principes de la relation des puissances franco-anglo-américaine. Les
deux groupes forment respectivement deux pôles distincts : le bloc de
l’Est et celui de l’Ouest. Un an auparavant, le plan Marshall a été l’élément
déclencheur de cette séparation ; les Etats-Unis financent la
reconstruction de l’Europe afin d’étendre son influence et sa lutte nouvelle contre
l’URSS. Désormais, une grande partie du monde voit d’un mauvais œil l’évolution
du dernier totalitarisme post-guerre. Orwell, britannique se permet donc de mettre
en garde contre le système totalitaire soviétique qui menacerait le pacifisme
mondial et surtout, l’Humanité.
En 1984, Londres est
devenue la capitale de l’Océania, région anglophone du nouveau monde. Cette
nouvelle ère laisse place à un régime totalitaire dirigé par le parti unique du
Big Brother. Plus rude que n’importe quelle dictature, l’Homme n’est plus et
constitue uniquement une masse endoctrinée, dirigée aussi bien physiquement que
mentalement. Voici la particularité de ce monde. Les esprits sont identiques et
contrôlés bien évidemment par une élite qui s’accapare les richesses et laisse
les populations inférieures sans ressources. Mais pour régner, l’ordre mondial
totalitaire doit être assuré. Tout comme le régime totalitaire basique, la
propagande est l’arme majeure. Mais dans le roman vu comme futuriste, de
nouveaux moyens sont mis en œuvre. C’est ainsi que la technologie et
l’innovation ont été mises à profit pour l’emprise du peuple. Le régime de l’Oceania utilise le plus souvent
des télé-écrans, d’une part pour diffuser des messages de propagande ou bien
d’instaurer une crainte face au visage permanent de Big Brother, d’autre part
pour enregistrer chaque conversation afin de sanctionner l’homme ayant émis une
parole suspecte. Chacun des lieux est surveillé de cette manière, ainsi, un
opposant au régime peut vite être démasqué, mais la plupart du temps, cela
incite à se conformer aux règles et à croire au bienfait de ce Big Brother tant
vénéré par le culte de la personnalité. Le choix de son nom signifiant
« Grand frère » lui ajoute la notion de protecteur intime et amical,
ce qui est un paradoxe du principe de non-affection entre les habitants de
l’Océania. C’est la « désintégration du noyaux familial » qui prône
la dénonciation des membres d’une même famille. Tout comme le surnom attribué à
Staline « petit père des peuples » alors qu’il séparait les enfants
de leur famille afin d’éduquer et d’orienter leur esprit dans des organisations
patriotiques.
Le portrait de ce
dernier est décrit comme « plein de puissance et de calme
mystérieux » mais aussi en tant que « lourd, calme,
protecteur ». Ces antithèses renforcent l’image bienveillante qu’installe
son visage permanent. L’histoire de Big Brother brosse la figure d’un surhomme historique
s’étant démené pour son peuple dès le début du nouveau monde lors de la
Révolution : « chef et gardien de la Révolution depuis les premiers
jours ». Le Parti vante ses exploits auprès de la population qui le vénère
malgré le doute qui plane au-dessus de son existence. En effet, Big Brother
n’est jamais apparu autrement que par l’exposition de son visage sur les
affiches ou télé-écrans. De plus, de nouveaux exploits à son égard sont racontés
de jour en jour alors que la Révolution s’est faite quarante voir cinquante ans
auparavant. Il est comme immortel. Ainsi, l’existence de ce « Grand
Frère » tant glorifié semble être erronée : il n’est qu’un outil du
Parti pour assouvir son pouvoir car chaque masse a besoin d’un modèle.




L’illustration ressemble étonnement au portrait d’un espion soviétique Richard Sorge provenant d’un timbre. Big Brother est représenté comme un homme d’environ 40 ans, marqué par ses traits durs, sa bouche pincée et ses yeux froncés. Il illustre aussi bien la confiance en soi, la force, que la crainte et l’emprise. Le fond rouge en arrière-plan peut être interprété par le symbole du sang et la peur, ou bien par l’analogie du communiste stalinien (sa couleur symbolique étant le rouge). Il incarne le visage de cette ère nouvelle notée par la notion de grandeur.
L’environnement est
lui aussi aménagé en faveur du Parti. La ville de Londres a perdu depuis
longtemps son charme britannique. Elle ne possède pas de détails dans l’œuvre
mis à part la description de gigantesques infrastructures du Parti. Les quatre
ministères de l’Amour, de l’Abondance, de la Vérité et de la Paix la
surplombent : « trois cent mètres de hauteur » qui illustrent
bien l’omniprésence écrasante du parti dans la vie des hommes qui ne possèdent
désormais plus de vie privée.
Le fonctionnement
prospère du Parti du Big Brother se base en réalité sur le non-acquis. Le
gouvernement sans cesse lutte contre ses supposés obstacles et ce, de manière
discrète. Le monde de l’Océania a réussi à convaincre le peuple de sa
nécessité. Pratiquement tout le monde adhère sans se poser de questions sur le
bien et le bonheur. Toute notion passée est redéfinie. Pour commencer, la
langue est modifiée laissant place à la « novlangue ». Arme fatale
contre la liberté de penser, ce moyen d’expression signifiant mot à mot « nouvelle
langue » réduit la diversité du vocabulaire en ne gardant que les mots utiles,
c’est-à-dire ceux ayant un lien avec la vie sous le régime du Parti. Elle aboli
certains termes comme « démocratie, science, justice, moralité,
honneur » qui sont à présent dénués de sens ; ils n’existent plus car
ce qu’ils représentaient auparavant est mort et enterré. La grammaire est elle
aussi touchée par ce recul du savoir. Afin que la réflexion et l’expression
soient limitées, les mots sont simplifiés : par exemple, l’antonyme de
« bon » n’est plus « mauvais » mais « unbon ».
Aucune exception n’est autorisée, « des chevaux » deviennent « des
chevals ». De cette manière, l’intellectuel est bannit des esprits des
hommes : une nouvelle valeur est créé « L’ignorance, c’est la
force !». La préméditation de révolte et de pensée marginale est devenue
impossible et ce, à l’encontre de la volonté de l’Homme.
Parmi cet univers
futur complètement métamorphosé en une machine à hommes soumis, se
trouverait-il un ou plusieurs sujets singuliers ? Le Parti a tout mis en
œuvre pour éviter ces personnes menaçant l’équilibre totalitaire. Cependant, le
roman nous trace l’évolution -d’un point de vue interne ou omniscient- de
Winston Smith, 39 ans travaillant en tant que falsificateur de documents au
Ministère de la Vérité (en novlang, Miniver). Il habite dans un immeuble plutôt
délabré où il entretient dans une alcôve à l’abri du télé-écran, un journal secret ;
support de ses pensées contraires au Parti.
Orwell le présente ainsi comme un opposant du régime. Tout d’abord, physiquement : Winston est blond, maigre et frêle, tout le contraire de la prestance et du charisme que véhicule l’image aux cheveux bruns de Big Brother comme nous l’avons vu précédemment. Cette mise en scène défiant le protagoniste au régime totalitaire amène le lecteur à se mettre du côté de cet homme qui semble singulier et qui paraît être le seul à réfléchir en faveur de son bienêtre. Ensuite, ses contestations intérieures sont révélées lors des Deux Minutes de la Haine : message diffusé par le télé-écran de l’entreprise où l’on aperçoit des images de l’ennemi de l’Océania, se prénommant Goldstein qui incitent les employés à évacuer leur haine et leur colère par des cris et des gestes de furie. Winston est en dehors de cela. L’auteur le singularise et élève son personnage car ce dernier n’obéit pas à cette haine quotidienne imposée par le Parti ; ses sentiments ne doivent pas être orientés. Il est supérieur à la masse. Pour cela, Orwell n’a pas besoin de le glorifier au contraire, son infériorité physique le rend plus humain face à la machine du Parti. Un homme est plus qu’un simple être parmi tant d’autres identiques comme veut le faire penser le gouvernement : il est particulier par son histoire, ses pensées, ses actes. C’est pourquoi l’auteur fait de Winston un protagoniste résistant, prenant des risques tout d’abord par ses pensées. Il se voit dorénavant comme opposant réel du Parti, se pose des questions sur une possible résistance. A cela s’ajoutent tous ses souvenirs du passé symbolisé par les rêves de bienêtre et de l’amour familial qu’il éprouvait à l’égard de sa mère avant le pouvoir totalitaire. Toute cette réflexion intime présente en réalité le crime de pensée. Pour aller encore plus loin, l’écrivain évoque la notion d’utopie selon Winston qui nomme cet endroit imaginaire le « Pays doré » : il l’aide à s’échapper de la contre-utopie du totalitarisme, le rêve est un refuge mais un crime. Orwell prouve son engagement contre le totalitarisme et pour le pacifisme en associant à son personnage, le motif de l’amour. Après avoir été intrigué par une jeune femme brune, Winston se lie d’amour pour cet être qui partage les mêmes idées de révolte. Une lueur d’espoir et de bonheur vient percer le sombre ciel de l’Océania. Cette femme de 26ans se nomme Julia et travaille pour le Commissariat aux Romans (car bien évidemment, la culture est limitée et créé au profit du patriotisme). Le couple formera une union d’amour et de pensées. L’alliance est ici vue comme seule arme fatale contre une autre ligue -ici le gouvernement-. L’écrivain défend donc ici l’idée d’alliance des états pour lutter contre le régime totalitaire de l’URSS. Cependant, un faux pas gâcherait tout et c’est ce qui va arriver à notre protagoniste. Le roman est le support d’un réel parti pris de l’auteur : s’il veut prévenir, il doit choquer. Pour cela, Winston qui avait été le héros du lecteur, ne va pas s’en sortir. L’humanité qu’il représentait l’a mené au néant face à la trop puissante institution du Parti. Après avoir été piégé par le vieillard qui l’hébergeait, ainsi que par O’Brien qui se faisait passé pour un membre de la résistance secrète, il va se faire arrêter avec Julia. Aucune échappatoire n’est possible : il se fait torturer par cet O’Brien, qui se révèle être en réalité le chef de la police de la Pensée. Comment de tels hommes ont-ils pu incarner le peu d’humanité auquel espérait Winston ? Le lecteur se méprend, il ne comprend pas, et c’est le but d’Orwell. Ce dernier veut faire prendre conscience du pouvoir d’un régime qui change les hommes. L’Humanité est à préserver. Lors de son arrestation, le martyre de Smith lui montre les idées cruelles qu’il avait soutenues pour renverser le parti, il se rend ainsi compte qu’il était prêt à « tuer » ce qui lui ôte cette caractéristique d’humanité puisqu’il deviendrait aussi barbare que ses bourreaux. Plus tard, au fil des tortures des plus horribles qui lui sont infligées, notre héros se métamorphosera en un robot du Parti : il sera convaincu de ses bienfaits. Sa décadence morale se comprend lorsqu’il hurle qu’il préfère qu’on tue Julia plutôt qu’on continue de le torturer ; « Ce que vous lui faites m’est égal. Déchirez-lui le visage. Epluchez-la jusqu’aux os. Pas moi ! Julia ! Pas moi ! » Cette bestialité désacralise sa personne autrefois perçu comme héroïque. Cependant, cet évènement nous renseigne aussi sur l’obéissance de la population : les sujets doivent perdre leur humanité.
Winston
Orwell le présente ainsi comme un opposant du régime. Tout d’abord, physiquement : Winston est blond, maigre et frêle, tout le contraire de la prestance et du charisme que véhicule l’image aux cheveux bruns de Big Brother comme nous l’avons vu précédemment. Cette mise en scène défiant le protagoniste au régime totalitaire amène le lecteur à se mettre du côté de cet homme qui semble singulier et qui paraît être le seul à réfléchir en faveur de son bienêtre. Ensuite, ses contestations intérieures sont révélées lors des Deux Minutes de la Haine : message diffusé par le télé-écran de l’entreprise où l’on aperçoit des images de l’ennemi de l’Océania, se prénommant Goldstein qui incitent les employés à évacuer leur haine et leur colère par des cris et des gestes de furie. Winston est en dehors de cela. L’auteur le singularise et élève son personnage car ce dernier n’obéit pas à cette haine quotidienne imposée par le Parti ; ses sentiments ne doivent pas être orientés. Il est supérieur à la masse. Pour cela, Orwell n’a pas besoin de le glorifier au contraire, son infériorité physique le rend plus humain face à la machine du Parti. Un homme est plus qu’un simple être parmi tant d’autres identiques comme veut le faire penser le gouvernement : il est particulier par son histoire, ses pensées, ses actes. C’est pourquoi l’auteur fait de Winston un protagoniste résistant, prenant des risques tout d’abord par ses pensées. Il se voit dorénavant comme opposant réel du Parti, se pose des questions sur une possible résistance. A cela s’ajoutent tous ses souvenirs du passé symbolisé par les rêves de bienêtre et de l’amour familial qu’il éprouvait à l’égard de sa mère avant le pouvoir totalitaire. Toute cette réflexion intime présente en réalité le crime de pensée. Pour aller encore plus loin, l’écrivain évoque la notion d’utopie selon Winston qui nomme cet endroit imaginaire le « Pays doré » : il l’aide à s’échapper de la contre-utopie du totalitarisme, le rêve est un refuge mais un crime. Orwell prouve son engagement contre le totalitarisme et pour le pacifisme en associant à son personnage, le motif de l’amour. Après avoir été intrigué par une jeune femme brune, Winston se lie d’amour pour cet être qui partage les mêmes idées de révolte. Une lueur d’espoir et de bonheur vient percer le sombre ciel de l’Océania. Cette femme de 26ans se nomme Julia et travaille pour le Commissariat aux Romans (car bien évidemment, la culture est limitée et créé au profit du patriotisme). Le couple formera une union d’amour et de pensées. L’alliance est ici vue comme seule arme fatale contre une autre ligue -ici le gouvernement-. L’écrivain défend donc ici l’idée d’alliance des états pour lutter contre le régime totalitaire de l’URSS. Cependant, un faux pas gâcherait tout et c’est ce qui va arriver à notre protagoniste. Le roman est le support d’un réel parti pris de l’auteur : s’il veut prévenir, il doit choquer. Pour cela, Winston qui avait été le héros du lecteur, ne va pas s’en sortir. L’humanité qu’il représentait l’a mené au néant face à la trop puissante institution du Parti. Après avoir été piégé par le vieillard qui l’hébergeait, ainsi que par O’Brien qui se faisait passé pour un membre de la résistance secrète, il va se faire arrêter avec Julia. Aucune échappatoire n’est possible : il se fait torturer par cet O’Brien, qui se révèle être en réalité le chef de la police de la Pensée. Comment de tels hommes ont-ils pu incarner le peu d’humanité auquel espérait Winston ? Le lecteur se méprend, il ne comprend pas, et c’est le but d’Orwell. Ce dernier veut faire prendre conscience du pouvoir d’un régime qui change les hommes. L’Humanité est à préserver. Lors de son arrestation, le martyre de Smith lui montre les idées cruelles qu’il avait soutenues pour renverser le parti, il se rend ainsi compte qu’il était prêt à « tuer » ce qui lui ôte cette caractéristique d’humanité puisqu’il deviendrait aussi barbare que ses bourreaux. Plus tard, au fil des tortures des plus horribles qui lui sont infligées, notre héros se métamorphosera en un robot du Parti : il sera convaincu de ses bienfaits. Sa décadence morale se comprend lorsqu’il hurle qu’il préfère qu’on tue Julia plutôt qu’on continue de le torturer ; « Ce que vous lui faites m’est égal. Déchirez-lui le visage. Epluchez-la jusqu’aux os. Pas moi ! Julia ! Pas moi ! » Cette bestialité désacralise sa personne autrefois perçu comme héroïque. Cependant, cet évènement nous renseigne aussi sur l’obéissance de la population : les sujets doivent perdre leur humanité.
Voici comment
George Orwell conçois la lutte contre le totalitarisme soviétique :
l’alliance des hommes. Winston finira par être exécuté par le Parti alors qu’il
venait d’y adhérer. Le chute du héros montre que chaque personne est voué à la
mort ce qui renseigne sur l’inutilité d’un seul sujet dans un régime
totalitaire. L’auteur engagé rend le lecteur méfiant d’un système politique qui
se présente comme un modèle absolu. Ici, les valeurs sont complètement
renversées où le Mal règne et où les hommes sont ôtés de leur humanité. Par
ailleurs, il cherche à faire prendre conscience que la liberté est un don
inestimable car le lecteur s’associe à Winston, il s’imagine vivre dans ce
monde semblable à l’enfer. Le roman
dystopique lui fait réaliser ainsi que la démocratie est le meilleur système
politique favorable à la condition de l’Homme et le personnage de Winston est
le meilleur outil pour cette prise de conscience. La critique du totalitarisme
de l’URSS est explicite, elle ouvre les yeux des populations civiles de l’Ouest
sur la vie de l’Est et incite la lutte contre ce régime.
dimanche 16 février 2014
II/ Des inégalités sociales
L’époque
du XIXème siècle a permis aux écrivains de puiser leur inspiration dans de
nouveaux domaines. On retient principalement les thèmes sociaux et les héros du peuple.
Hugo s’est ainsi appuyé sur ses deux grandes thématiques pour la composition de son
chef d’œuvre, Les Misérables.
Tout
au long de sa vie, Victor Hugo s’est efforcé de lutter contre les injustices de
son temps. Dans les grandes villes de France, tel Paris, s’était développée une
terrible misère où un nombre incroyable de familles se logeaient dans de
pauvres taudis. Ces hommes, femmes et enfants souffraient du froid en hiver et
de la faim toute l’année.
Hugo,
conscient de l’horreur de cette misère, a voulu, en écrivant Les Misérables, éveiller les
esprits et démasquer les yeux de la triste réalité. Les gens du peuple, non
atteints par cette pauvreté se voilaient la face, effrayés, dégoûtés ou même
dérangés par ce qui les entourait. Pour Hugo, la misère n’était pas une
fatalité. Dans son roman, l’écrivain fait découvrir à ses lecteurs le réel
visage des injustices et des misères de
son temps : les mères qui doivent se prostituer afin de pouvoir nourrir
leurs enfants, les enfants, d’un si bas âge qui sont envoyés pour travailler,
les malheureux, si rongés par la faim, poussés au vol, à la criminalité, et
toute une humanité humiliée, opprimée, privée de droits et de dignité,
condamnée à la déchéance…
Hugo
entame son combat contre la misère avec Le
Dernier jour d’un condamné qu’il publie en 1829. Dans son roman,
l’auteur réclame l’abolition de la peine de mort (car, plutôt que de couper des
têtes, il vaut mieux, dit-il, s’attaquer à la misère qui est la principale
cause de la criminalité). Il dénonce à nouveau la peine de mort avec Claude Gueux publié en 1834. A
partir de l’année 1845, Hugo commence à rassembler plusieurs idées et plusieurs
notes avec le projet d’écrire un vaste roman qui dépeindrait la société de son
siècle. Il l’appellera d’abord Les
Misères et le rebaptisera Les
Misérables.
Hugo
fut à la fois poète et écrivain mais aussi homme politique. Il siège à
l’Assemblée en tant que député de Paris durant la Deuxième République, de 1848
à 1851. Il se fait entendre en demandant la mise en place de lois sociales qui
amélioreraient le sort des pauvres et des déshérités.
En
1849, il prononce son Discours sur la
misère devant l’Assemblée législative, discours qui restera célèbre :
« La misère, messieurs, […]
voulez-vous savoir jusqu’où elle peut aller, jusqu’où elle va, je ne dis pas en
Irlande, je ne dis pas au Moyen-Âge, je dis en France, je dis à Paris, et au
temps où nous vivons ? Voulez-vous des faits ? […] Il y a dans Paris,
[…] des rues, des maisons, des cloaques, où des familles, des familles
entières, vivent pêle-mêle, hommes, femmes, jeunes filles, enfants, n’ayant
pour lits, n’ayant pour couvertures, […] que des monceaux infects de chiffons
en fermentation […]. Voilà un fait. Et voulez-vous d’autres ? Ces
jours-ci, un homme, mon Dieu, un malheureux homme de lettres […] est mort de faim,
mort de faim à la lettre, et l’on a constaté, après sa mort, qu’il n’avait pas
mangé depuis six jours. Voulez-vous quelque chose de plus douloureux
encore ? Le mois passé, pendant la recrudescence du choléra, on a troué
une mère et ses quatre enfants qui cherchaient leur nourriture dans les débris
immondes et pestilentiels des charniers de Montfaucon (lieu où étaient
abattus les chevaux vieux ou malades ; leurs cadavres étaient jetés dans des charniers (des fosses).
Ce lieu grouillait de rats, attirés par l’odeur pestilentielle des cadavres en
décomposition) ! […] Eh bien,
messieurs, je dis que ce sont là des choses qui ne doivent pas être ; je
dis que la société doit dépenser toute sa force, toute sa sollicitude, toute
son intelligence, toute sa volonté, pour que de telles choses ne soient
pas ! »
Dans
le cadre d’une enquête sur les conditions de vie des classes ouvrières, Hugo se
rend, avec des députés, dans le Nord de la France, à Lille. L’écrivain visite
les caves dans lesquelles travaillent les ouvriers de l’industrie textile, et
ce qu’il voit le met en état d’alerte : des enfants mal et très peu vêtus,
affamés, malades à cause du froid et fiévreux, des hommes et des femmes affaiblis,
vieillis et usés bien avant l’âge à cause de leur travail, abrutis par le
malheur…
Hugo,
horrifié et révolté par ses découvertes dans les caves de Lille, rédige un
discours sur ce sujet en mars 1851 : « Figurez-vous
ces maisons, ces masures habitées du haut en bas, jusque sous terre, les eaux
croupissantes filtrant à travers les pavés dans ces tanières où il y a des
créatures humaines. Quelquefois, jusqu’à dix familles dans une masure, jusqu’à
dix personnes dans une chambre, jusqu’à cinq ou six dans un lit, les âges et
les sexes mêlés, les greniers aussi hideux que les caves, des galetas (logement
sordide, taudis) où il entre assez de
froid pour grelotter et pas assez d’air pour respirer ! »
Par
la suite, Hugo interpelle les hommes faisant les lois : « Messieurs, je vous dénonce la
misère ! […] Poursuivez-la, frappez-la, détruisez-la ! Car, je ne me
laisserai jamais le redire, on peut la détruire ! La misère n’est pas
éternelle ! Non ! je le répète en dépit des murmures, non, elle n’est
pas éternelle ! Il est dans sa loi de décroître et de disparaitre. La
misère, comme l’ignorance, est une nuit, et à toute nuit doit succéder le
jour. » Pour conclure, Hugo écrit : « Savez-vous ce qu’il y a des plus éloquent,
ce qu’il y a de plus irrésistible, ce qu’il y a de plus terrible pour commencer
les révolutions […], c’est un enfant qui crie à sa mère : j’ai
faim ! »
Hugo
ne prononcera pas ce discours à cause des évènements politiques qui vont
suivre. En décembre 1851, le président de la République, Louis-Napoléon
Bonaparte, modifie la Constitution (textes sur lesquels est fondée la
République) et dissout l’Assemblée nationale. Il agit ainsi dans le but
d’obtenir davantage de pouvoirs. C’est un coup d’Etat. La réaction du coup face
à cet évènement fut la résistance puis l’exil. Il commence par se rendre en
Belgique pour ensuite aller vers les îles anglophones. Pendant ce temps-là, en
France, Louis-Napoléon Bonaparte devient empereur sous le nom de Napoléon III.
Hugo
fut en exil d’abord sur l’île de Jersey puis sur celle de Guernesey, au large
des côtes normandes. Celui-ci exige que la République soit rendue aux Français
ou il ne reviendra pas en France. Ainsi, dit-il : « Quand la
liberté rentrera, je rentrerai. » Son exil s’étend sur vingt années (de 1852
à 1870, date à laquelle est proclamée la Troisième République). Cette période
lui permettre de composer plusieurs recueils poétiques. A Guernesey, il achève Les Misérables en 1862.
Avant
de publier le premier tome des Misérables,
Hugo écrit à son éditeur belge en mars 1862 : « Ma conviction est que ce livre sera un des principaux sommets, sinon le
principal, de mon œuvre. » L’écrivain avait juste.
L’action
des Misérables se déroule sur
dix-huit ans, de 1815 à 1833. A travers ce long roman, plusieurs personnages
sont mis en scène et dont les destinées se croisent ce qui forme le récit. Jean
Valjean est le personnage principal du livre et c’est autour de lui que
s’organise le roman.
Dans
Le Dernier jour d’un condamné
publié en 1829, ou encore dans Claude
Gueux, Victor Hugo exprime son horreur pour la peine de mort et son
désir de la voir abolie comme il l’a aussi réclamé en tant que député. La
préface ajoutée au premier de ces roman en 1832 est d’ailleurs très
explicite : « L’auteur
aujourd’hui peut démasquer l’idée politique, l’idée sociale, qu’il avait voulu populariser sous cette innocente et
candide forme littéraire. ». Il déclare donc, ou plutôt il avoue
hautement que : « Le Dernier
jour d’un condamné n’est autre chose qu’un plaidoyer, direct ou indirect,
comme on voudra, pour l’abolition de la peine de mort. »
L’immense
roman de Victor Hugo, Les Misérables,
est à la fois un réquisitoire pour dénoncer la misère du peuple au XIXème
siècle et un plaidoyer qui en révèle la grandeur. C’est un peuple affamé de
pain et de justice sociale qu’il représente magnifiquement à travers le destin
de Jean Valjean, envoyé au bagne pour avoir volé un pain afin de nourrir sa
famille. Après dix-neuf ans de bagne, il doit son salut à la bonté d’un évêque
et trouve la rédemption en devenant le maire d’une petite ville et le
bienfaiteur de Cosette qu’il recueille et dont il assure le bonheur.
Les Misérables est
une œuvre majeure de la littérature du XIXème siècle. Ce roman dénonce la
misère sociale du siècle.
Au début des Misérables, Jean Valjean a
quarante-six ans. Il vient de passer dix-neuf ans au bagne, synonyme d’enfer.
En effet, les conditions de vie des forçats étaient terribles. On les fait
travailler, de l’aube jusqu’au soir jusqu’à ce qu’ils soient à bout de force
avec les pieds fixés par de lourdes chaînes et la menace constante des bâtons
des gardiens. Pour dormir, ils devaient se contenter de bancs en bois, pas de
matelas ni de couverture et enchaînés à des anneaux de fer. Au moindre écart de
conduite, c’était les coups de bâtons et le cachot.
Jean Valjean est né dans
une humble famille de paysans. Il a toujours connu la misère et la pauvreté.
Ayant perdu ses parents très jeune, c’est sa sœur Jeanne qui l’a éduqué. Etant
devenu un homme, lorsque son aînée perdit son mari, Jean Valjean dût à son tour
lui venir en aide. Se retrouvant veuve, Jeanne était seule avec sept petits enfants
à la charge.
La cause de Jean Valjean est un des thèmes des Misérables les plus discutables. Un forçat rejeté
par la société devient un homme honorable, mais son existence tranquille est
troublée par son passé. Doit-il être condamné pour ses anciennes fautes ?
La justice dans cette cause, est-elle vraiment juste ?
Un autre point des débats
est la gravité de la punition. Il est souvent objecté que la misère de Valjean
est hyperbolisée et qu’en réalité même à cette époque-là, on n’aurait pas
condamné un homme aux galères pour le vol d’un pain. Aussi invraisemblable que
cela paraisse, Hugo s’est inspiré de l’histoire réelle d’un galérien nommé
Pierre Maurin. Celui-ci a été condamné en 1801 à cinq ans de galères pour le vol d’un pain, motivé par une
seule raison – il avait voulu nourrir les sept enfants affamés de sa sœur.
Après sa libération, Maurin, comme Valjean, frappe à la porte d’un évêque –
Monsignor Miollis, un modèle réel pour le personnage de Monseigneur Myriel –
qui le sauve de son malheur.
Dans Les Misérables, Jean
Valjean est un personnage de la plus haute importance – on peut suivre le
développement de son caractère et de sa psychologie. Sa vie est dure du début à
la fin, même s’il éprouve aussi des moments de joie. Dans son existence
pénible, il faut souligner surtout trois événements qui ont eu une influence
considérable sur lui et ont changé sa destinée. C’est la rencontre avec M.
Myriel, l’affaire Champmathieu et la confession à Marius où, après de lourds
combats intérieurs, Valjean prend de graves décisions.
Valjean était à l’origine
un homme pauvre et malheureux, mais pas mauvais. Ce fut son séjour de dix-neuf
au bagne qui lui a endurci le cœur : il «était entré au bagne sanglotant et
frémissant ; il en sortit impassible ». Après sa libération, Valjean ne
rencontre que mépris, haine et préjugés ; on le chasse de partout, on lui
refuse gîte et couvert. Désespéré, il frappe à la porte qu’on lui a indiqué,
sans savoir qu’il s’agit d’un évêché. Il se hâte d’avouer son identité et
attend d’être chassé comme toujours, mais M. Myriel, un évêque, le traite avec
compréhension, compassion et même avec considération. « [Dire] Monsieur à un
forçat, c’est [donner] un verre d’eau à un naufragé ». Pourtant, ces quelques
moments de gentil traitement ne peuvent pas éteindre dix-neuf ans de peine.
Dans la nuit, Valjean se lève pour prendre la fuite – il résiste à l’idée de
tuer l’évêque, mais il emporte l’argenterie, oubliant tous ses sentiments du
soir. Quelques heures plus tard, il est pris par les gendarmes et amené chez M.
Myriel. Celui-ci, qui comprend très bien la situation de Valjean, ne tarde pas
à le sauver. Il déclare que l’argenterie était un cadeau et lui donne aussi des
chandeliers d’argent. Valjean, stupéfait, ne comprend pas une telle
bienveillance, mais son cœur durci n’est pas encore touché par les mots de
l’évêque : « Jean Valjean, mon frère, vous n’appartenez plus au mal, mais au
bien. C’est votre âme que je vous achète; je la retire aux pensées noires et à
l’esprit de perdition et je la donne à Dieu ». En se hâtant hors du village,
Valjean est balloté par divers sentiments – sa haine et sa colère sont mêlées à
l’humiliation et l’attendrissement. Mais il faut qu’il commette un dernier
crime pour que son cœur fonde – après avoir volé un petit savoyard, il prend
conscience de tout le mal qu’il a accompli et considère l’effet de l’acte de M.
Myriel. « Alors son cœur creva et il se mit à pleurer. C’était la première fois
qu’il pleurait depuis dix-neuf ans. ». Ainsi un bonhomme d’évêque réussit à
convertir une âme presque damnée, et Valjean se débarrasse de son passé et
change d’identité ainsi que sa vie entière.
Huit ans plus tard vit à
Montreuil-sur-Mer M. Madeleine, un maire respectable au bon cœur ; personne ne
reconnaît en lui l’ancien forçat Valjean. Pourtant il y a un homme qui soupçonne son identité – un inspecteur de
Montreuil nommé Javert, qui le dénonce, après certains événements, à la
préfecture de police. Entre temps la police arrête un autre homme qu’elle
considère comme Valjean, M. Madeleine est donc laissé tranquille. L’affaire
paraît être conclue pour le maire – un homme inconnu assurera la vie paisible
du Valjean réel qui a toutefois fait beaucoup d’effort pour redresser les abus
du passé et gagner la reconnaissance de la société. Mais ce qui ne laisse pas
Madeleine tranquille, c’est sa conscience. Peut-on laisser souffrir un autre
homme, bien que criminel, pour ses propres péchés ? Il fait alors face à un
dilemme terrible – doit-il se livrer et perdre les fruits de son effort de huit
ans ou garder son secret, mais perdre la paix de sa conscience et la grâce de
Dieu ? Cette question rage dans la tête de Valjean comme une tempête et il
passe une nuit effroyable. Examinant tous les arguments, sa décision est
toujours plus difficile. D’une part il a des responsabilités et des projets - il est un bienfaiteur de la
région qui s’occupe de ceux qui en ont besoin et il emploie des gens pauvres dans ses
fabriques ; de plus il a promis à Fantine, gravement malade, de lui amener sa
petite fille. Mais d’autre part ne rien dire, cela signifie condamner un homme
qui, peut-être, n’a commis aucun crime, aux galères à perpétuité – c’est
presque la même chose que de le tuer. Il est clair que le premier choix serait
plus avantageux pour Valjean, mais il se rend compte que son but est de «
Sauver, non sa personne, mais son âme. », et que « Se livrer, sauver cet homme
[...] c’était là vraiment achever sa résurrection, et fermer à jamais l’enfer
d’où il sortait ». Alors, il se résout à assister à un procès et à prendre la
décision finale sur place. Pour faire ainsi, il faut réaliser un voyage rapide
et à cause de quelques complications, Valjean perd l’espoir d’arriver à
l’heure. Il se dit que c’est une œuvre de la providence, mais toutefois il
continue sa route. Finalement il arrive juste à temps pour prendre connaissance
de la triste histoire de l’accusé Champmathieu et pour le sauver en avouant
tout. Cet acte retransforme le maire honoré en galérien méprisé, mais sa
conscience reste nette. Néanmoins ces moments d’horreur et de lutte intérieure
laissent aussi une autre marque encore plus visible – les cheveux gris du maire
deviennent tout à fait blancs.
Malgré tous les
obstacles, Valjean finit par remplir sa promesse donnée à Fantine de s’occuper
de sa fille abandonnée. Cosette devient le bonheur de sa vie, le sens unique de
sa vie : « Aimé de Cosette, il se trouvait guéri, reposé, apaisé, comblé,
récompensé, couronné, il n’en demandait pas d’avantage. ». Cependant il arrive
un jour où sa vie presque idyllique avec Cosette est rompue par l’apparition de
Marius – d’abord Valjean le hait, mais petit à petit il commence à comprendre
que sa fille ne peut passer sa vie entière avec son « papa » vieilli. Alors, il
supporte leur amour, il est prêt à se laisser tuer pour sauver la vie de Marius
sur la barricade. Après leur mariage, Valjean se dit qu’il a accompli son
devoir et que sa tâche est donc finie. Il se résout à abandonner Cosette pour
qu’elle puisse être heureuse. Or cette décision est très douloureuse et
signifie pour lui un grave sacrifice, Valjean doit donc prendre tout son
courage pour faire le pas final – confier à Marius son identité. Il choisit le
lendemain des noces de Cosette et Marius pour révéler à Marius son secret
accablant. Il lui explique ses raisons d’agir : « Vous me demandez ce qui me
force à parler ? une drôle de chose, ma conscience. » ; qu’il ne pouvait pas
être assis à leur table « avec la pensée que, si vous saviez qui je suis, vous
m’en chasseriez » et qu’il ne veut pas entacher leur avenir. Il se fait des
reproches, s’humilie, tout en cachant ses bonnes actions – il considère ce
sacrifice comme la punition finale de ses péchés : « pour que je me respecte,
il faut qu’on me méprise ». Sa confession est émouvante, amère et si
douloureuse qu’il ne peut s’empêcher de verser des larmes. Comme il l’a
supposé, son aveu influence l’opinion de Marius qui ne comprend point ce
caractère de martyre. Même s’il lui accorde des visites à Cosette, Marius
commence bientôt à regretter sa faiblesse et fait sentir à Valjean qu’il est un
visiteur importun. Ainsi poussé, Valjean se met en isolement total. Cette
séparation est probablement le plus difficile de tous ses actes – « Le premier
pas n’est rien ; c’est le dernier qui est difficile. Qu’était-ce que l’affaire
Champmathieu à côte du mariage de Cosette et de ce qu’il entraînait ? ». Perdre
une personne bien adorée est mille fois plus grave que perdre la liberté. Par
ce dernier sacrifice, Valjean perd tout sauf sa conscience.
Toutefois la conscience,
c’est la fortune la plus importante de Valjean. Éveillée par M. Myriel, elle
joue un rôle considérable dans toutes ses décisions. « Je suis un galérien qui
obéit à sa conscience, » dit-il. C’est avec elle que Valjean mène des luttes
compliquées dans les situations difficiles et c’est elle encore qui triomphe
toujours de ses côtés sombres. La conscience l’extrait du statut de forçat
maudit et l’aide à rester un homme honnête, ou bien à devenir presque saint.
La cause de Jean Valjean
est un des thèmes des Misérables les plus discutables. Un forçat rejeté par la
société devient un homme honorable, mais son existence tranquille est troublée
par son passé. Doit-il être condamné pour ses anciennes fautes ? La justice
dans cette cause, est-elle vraiment juste ?
Un autre point des débats
est la gravité de la punition. Il est souvent objecté que la misère de Valjean
est hyperbolisée et qu’en réalité même à cette époque-là, on n’aurait pas
condamné un homme aux galères pour le vol d’un pain. Aussi invraisemblable que
cela paraisse, Hugo s’est inspiré de l’histoire réelle d’un galérien nommé
Pierre Maurin. Celui-ci a été condamné en 1801 à cinq ans de galères pour le vol d’un pain, motivé par une
seule raison – il avait voulu nourrir les sept enfants affamés de sa sœur.
Après sa libération, Maurin, comme Valjean, frappe à la porte d’un évêque –
Monsignor Miollis, un modèle réel pour le personnage de Monseigneur Myriel –
qui le sauve de son malheur.
Dans Les Misérables, Jean
Valjean est un personnage de la plus haute importance – on peut suivre le
développement de son caractère et de sa psychologie. Sa vie est dure du début à
la fin, même s’il éprouve aussi des moments de joie. Dans son existence
pénible, il faut souligner surtout trois événements qui ont eu une influence
considérable sur lui et ont changé sa destinée. C’est la rencontre avec M.
Myriel, l’affaire Champmathieu et la confession à Marius où, après de lourds
combats intérieurs, Valjean prend de graves décisions.
Valjean était à l’origine
un homme pauvre et malheureux, mais pas mauvais. Ce fut son séjour de dix-neuf
au bagne qui lui a endurci le cœur : il «était entré au bagne sanglotant et
frémissant ; il en sortit impassible ». Après sa libération, Valjean ne
rencontre que mépris, haine et préjugés ; on le chasse de partout, on lui
refuse gîte et couvert. Désespéré, il frappe à la porte qu’on lui a indiqué,
sans savoir qu’il s’agit d’un évêché. Il se hâte d’avouer son identité et
attend d’être chassé comme toujours, mais M. Myriel, un évêque, le traite avec
compréhension, compassion et même avec considération. « [Dire] Monsieur à un
forçat, c’est [donner] un verre d’eau à un naufragé ». Pourtant, ces quelques
moments de gentil traitement ne peuvent pas éteindre dix-neuf ans de peine.
Dans la nuit, Valjean se lève pour prendre la fuite – il résiste à l’idée de
tuer l’évêque mais il emporte
l’argenterie, oubliant tous ses sentiments du soir. Quelques heures plus tard,
il est pris par les gendarmes et amené chez M. Myriel. Celui-ci, qui comprend
très bien la situation de Valjean, ne tarde pas à le sauver. Il déclare que
l’argenterie était un cadeau et lui donne aussi des chandeliers d’argent.
Valjean, stupéfait, ne comprend pas une telle bienveillance, mais son cœur
durci n’est pas encore touché par les mots de l’évêque : « Jean Valjean, mon
frère, vous n’appartenez plus au mal, mais au bien. C’est votre âme que je vous
achète; je la retire aux pensées noires et à l’esprit de perdition et je la
donne à Dieu ». En se hâtant hors du village, Valjean est balloté par divers
sentiments – sa haine et sa colère sont mêlées à l’humiliation et
l’attendrissement. Mais il faut qu’il commette un dernier crime pour que son
cœur fonde – après avoir volé un petit savoyard, il prend conscience de tout le
mal qu’il a accompli et considère l’effet de l’acte de M. Myriel. « Alors son
cœur creva et il se mit à pleurer. C’était la première fois qu’il pleurait
depuis dix-neuf ans. ». Ainsi un bonhomme d’évêque réussit à convertir une âme
presque damnée, et Valjean se débarrasse de son passé et change d’identité
ainsi que sa vie entière.
Huit ans plus tard vit à
Montreuil-sur-Mer M. Madeleine, un maire respectable au bon cœur ; personne ne
reconnaît en lui l’ancien forçat Valjean. Pourtant il y a un homme qui soupçonne son identité – un inspecteur de
Montreuil nommé Javert, qui le dénonce, après certains événements, à la
préfecture de police. Entre temps la police arrête un autre homme qu’elle
considère comme Valjean, M. Madeleine est donc laissé tranquille. L’affaire
paraît être conclue pour le maire – un homme inconnu assurera la vie paisible
du Valjean réel qui a toutefois fait beaucoup d’effort pour redresser les abus
du passé et gagner la reconnaissance de la société. Mais ce qui ne laisse pas
Madeleine tranquille, c’est sa conscience. Peut-on laisser souffrir un autre
homme, bien que criminel, pour ses propres péchés ? Il fait alors face à un
dilemme terrible – doit-il se livrer et perdre les fruits de son effort de huit
ans ou garder son secret, mais perdre la paix de sa conscience et la grâce de
Dieu ? Cette question rage dans la tête de Valjean comme une tempête et il
passe une nuit effroyable. Examinant tous les arguments, sa décision est
toujours plus difficile. D’une part il a des responsabilités et des projets - il est un bienfaiteur de la
région qui s’occupe de ceux qui en ont besoin et il emploie des gens pauvres dans ses
fabriques ; de plus il a promis à Fantine, gravement malade, de lui amener sa
petite fille. Mais d’autre part ne rien dire, cela signifie condamner un homme
qui, peut-être, n’a commis aucun crime, aux galères à perpétuité – c’est
presque la même chose que de le tuer. Il est clair que le premier choix serait
plus avantageux pour Valjean, mais il se rend compte que son but est de «
Sauver, non sa personne, mais son âme. », et que « Se livrer, sauver cet homme
[...] c’était là vraiment achever sa résurrection, et fermer à jamais l’enfer
d’où il sortait ». Alors, il se résout à assister à un procès et à prendre la
décision finale sur place. Pour faire ainsi, il faut réaliser un voyage rapide
et à cause de quelques complications, Valjean perd l’espoir d’arriver à
l’heure. Il se dit que c’est une œuvre de la providence, mais toutefois il
continue sa route. Finalement il arrive juste à temps pour prendre connaissance
de la triste histoire de l’accusé Champmathieu et pour le sauver en avouant
tout. Cet acte retransforme le maire honoré en galérien méprisé, mais sa
conscience reste nette. Néanmoins ces moments d’horreur et de lutte intérieure
laissent aussi une autre marque encore plus visible – les cheveux gris du maire
deviennent tout à fait blancs.
Malgré tous les
obstacles, Valjean finit par remplir sa promesse donnée à Fantine de s’occuper
de sa fille abandonnée. Cosette devient le bonheur de sa vie, le sens unique de
sa vie : « Aimé de Cosette, il se trouvait guéri, reposé, apaisé, comblé,
récompensé, couronné, il n’en demandait pas d’avantage. ». Cependant il arrive
un jour où sa vie presque idyllique avec Cosette est rompue par l’apparition de
Marius – d’abord Valjean le hait, mais petit à petit il commence à comprendre
que sa fille ne peut passer sa vie entière avec son « papa » vieilli. Alors, il
supporte leur amour, il est prêt à se laisser tuer pour sauver la vie de Marius
sur la barricade. Après leur mariage, Valjean se dit qu’il a accompli son
devoir et que sa tâche est donc finie. Il se résout à abandonner Cosette pour
qu’elle puisse être heureuse. Or cette décision est très douloureuse et
signifie pour lui un grave sacrifice, Valjean doit donc prendre tout son
courage pour faire le pas final – confier à Marius son identité. Il choisit le
lendemain des noces de Cosette et Marius pour révéler à Marius son secret
accablant. Il lui explique ses raisons d’agir : « Vous me demandez ce qui me
force à parler ? une drôle de chose, ma conscience. » ; qui ne pouvait pas être
assis à leur table « avec la pensée que, si vous saviez qui je suis, vous m’en
chasseriez » et qu’il ne veut pas entacher leur avenir. Il se fait des
reproches, s’humilie, tout en cachant ses bonnes actions – il considère ce
sacrifice comme la punition finale de ses péchés : « pour que je me respecte,
il faut qu’on me méprise ». Sa confession est émouvante, amère et si
douloureuse qu’il ne peut s’empêcher de verser des larmes. Comme il l’a
supposé, son aveu influence l’opinion de Marius qui ne comprend point ce
caractère de martyre. Même s’il lui accorde des visites à Cosette, Marius
commence bientôt à regretter sa faiblesse et fait sentir à Valjean qu’il est un
visiteur importun. Ainsi poussé, Valjean se met en isolement total. Cette
séparation est probablement le plus difficile de tous ses actes – « Le premier
pas n’est rien ; c’est le dernier qui est difficile. Qu’était-ce que l’affaire
Champmathieu à côte du mariage de Cosette et de ce qu’il entraînait ? ». Perdre
une personne bien adorée est mille fois plus grave que perdre la liberté. Par
ce dernier sacrifice, Valjean perd tout sauf sa conscience.
Toutefois la conscience est
la fortune la plus importante de Valjean. Éveillée par M. Myriel, elle joue un
rôle considérable dans toutes ses décisions. « Je suis un galérien qui obéit à sa conscience », dit-il. C’est avec
elle que Valjean mène des luttes compliquées dans les situations difficiles et
c’est elle encore qui triomphe toujours de ses côtés sombres. La conscience l’extrait
du statut de forçat maudit et l’aide à rester un homme honnête, ou bien à
devenir presque saint.
Jean Valjean, le personnage principal de Les Misérables de Victor Hugo, est un homme intégral
de l’histoire de la rédemption d’une société corrompt. Symboliquement, la force
de Valjean représente son courage interne pour changer sa situation. Bien que
ses expériences passées étaient criminelles et injustes, il change sa vie et il
peut aider les autres misérables. Il prouve qu’il est un homme valable par sa
tutelle de Cosette et ses actes bienveillants pendant les temps de violence et
fouillis. La métamorphose de Valjean dans Les
Misérables lui permet d’aider
le peuple et montre la compassion dans leurs cœurs.
« Elle
se nommait Fantine. Pourquoi Fantine ? On ne lui avait jamais connu
d’autre nom. » Victor Hugo, les Misérables, tome I, lire 3, chapitre 2
« Fantine
était un de ces êtres comme il en éclot, pour ainsi dire, au fond du peuple.
Sortie des plus insondables épaisseurs de l’ombre sociale, elle avait au front
le signe de l’anonyme et de l’inconnu. Elle était née à Montreuil-sur-Mer. De
quels parents ? Qui pourrait le dire ? On ne lui avait jamais connu
ni père ni mère. […] A dix ans, Fantine quitta la ville et s’alla metrre en
service chez les fermiers des environs. A quinze ans, elle vint à Paris
« chercher fortune ». Fantine était belle et resta pure le plus
longtemps qu’elle put. C’était une jolie blonde avec de belles dents. Elle
avait de l’or et des perles pour dot, mais son or était sur sa tête et ses
perles étaient dans sa bouche. Elle travailla pour vivre ; puis, toujours
pour vivre, car le cœur a sa faim aussi, elle aima. Elle aima Tholomyès. »
Félix Tholomyès, fils de
riches bourgeois établis à Toulouse, était venu faire ses études à Paris, où il
menait une joyeuse vie. Fantine tomba amoureuse de cet étudiant insouciant, un
peu poète à ses heures, et elle céda sans doute trop vite à sa passion, sans se
rendre compte que cette passion n’était pas partagée : pour Tholomyès, en
effet, Fantine n’était qu’une amourette, qu’une de ces filles comme il y en a
tant dans Paris et qu’on appelle des grisettes : de modestes ouvrières
qu’on attrape facilement avec de belles paroles et de jolis cadeaux, qu’on aime
le temps d’une aventure, puis qu’on abandonne sans regret.
Fantine et Tholomyès
devinrent donc amants, et ce bonheur dura un peu plus de deux ans, durant
lesquels Fantine mit au monde une petite fille, qu’elle prénomma Euphrasie,
mais à laquelle elle donna le tendre surnom de Cosette. Et puis un jour vint où
Tholomyès, ses études à peu près achevées, décida de regagner la province, où
l’attendaiit une vie confortable de bourgeois rangé. Dans cette vie-là, Fantine
n’avait pas sa place. La petite Cosette encore moins : Tholomyès n s’était
jamais interessé à elle, et il ne se souciait pas plus du sort de sa fille que
de celui de Fantine.
Fantine pleura. Depuis le
début de sa liaison avec Tholomyès, elle avait cessé de travailler, et goûté
aux joies de la vie facile. Désormais, elle se trouvait sans ressources et
condamnée à la déchéance. Car, au début du XIXème siècle, la morale condamnait
sévèrement les filles-mères, c’est-à-dire les femmes qui avaient un enfant sans
être mariées. Ces femmes-là étaient méprisées et rejetées par la société.
Lorsque Fantine quitta
Paris et retourna à Montreuil-sur-Mère, la ville où elle avait grandi, elle
trouva la famille des Thénardier pour garder Cosette. La mère devait, bien
évidemment, payer une somme régulièrement qui augmenta progressivement.
Mais dès que Fantine fut
partie, les Thénardier traitèrent Cosette avec la plus grande cruauté :
« on l’habilla des vieilles jupes et
des vieilles chemises des petites Thénardier, c’est-à-dire de haillons. On la
nourrit des restes de tout le monde, un peu mieux que le chien et un peu plus
mal que le chat. […] Cosette mangeait avec eux sous la table dans une écuelle
de bois pareille à la leur. »
Souvent Fantine écrivait
(ou plutôt, elle faisait écrire, car elle ne savait ni lire, ni écrire) pour
avoir des nouvelles de sa fille ; on lui répondait que Cosette se portait
à merveille ? mais la pauvre enfant était en réalité maltraitée ; sur
elle pleuvaient les coups et les injures, car les Thénardier étaient de
méchantes gens, de mauvaises âmes.
Fantine est d’un
tempérament doux, elle est courageuse et généreuse pour sa fille, mais elle
aussi faible et naïve, elle se laisse abuser facilement.
Elle n’est pas maîtresse
de son destin : elle subit le destin qui est matérialisé par les
Thénardier, la société, ils sont sans pitié.
Fantine est le personnage
misérable entre tous. Victime de son injuste destin, dès sa naissance – elle
n’a pas de famille, pas de nom – poursuivie par le malheur, abandonnée par
celui qu’elle aime, abusée par les gens sans scrupule : Tholomyès, les
Thénardier, le fabricant de perruques, l’arracheur de dents, elle cumule tous
les malheurs, la cruauté d’un bourgeois et l’implacable rigueur de Javert…
Hugo prend Fantine
d’autant plus « misérable », pitoyable et émouvant, qu’elle était au
départ très jolie, pure, naïve. Il dénonce à travers elle, ce qui fut le sort
de bien des jeunes filles de campagne quia allèrent « chercher
fortune » à Paris : la trahison amoureuse, les enfants non voulus, la
misère matérielle et morale, l’abandon et le mépris de la société bien pensante
envers les filles-mères.
Gavroche, né en 1820, est
le fils des Thénardier qui rejettent leur fils. Le « gamin de Paris »
se retrouve alors livré à lui-même dans les rues de la ville. Il dort, mange
dans la rue et se débrouille tout seul.
Gavroche meurt le 6 juin
1832 alors qu’il chantait une chanson célèbre :
« Je suis tombé par terre,
C'est la faute à
Voltaire,
Le nez dans le ruisseau,
C'est la faute à …
Rousseau. »
Deux balles lui furent tirées dans la tête.
Quand Hugo évoque, dans Les Misérables, les émeutes
parisiennes qui tentent de renerser la monarchie de Juillet, en dressant les
barricades dans les rues de Paris, en juin 1832, il choisit la figure
emblématique de Gavroche. Celui-ci symbolise parfaitement le peuple des
« Misérables » qui mobilise sa vitalité, sa vivacité d’esprit dans ce
mouvement de révolte : « […] il
ranimait les fatigués […] mettait les uns en gaieté, les autres en haleine […]
tous en mouvement, piquait un étudiant, mordait un ouvrier ; se posait,
s’arrêtait repartait, volait au-dessus du tumulte et de l’effort, sautait de
ceux-ci à ceux-là, murmurait, bourdonnait, et harcelait tout l’attelage ;
mouche de l’immense Coche révolutionnaire. » La longue énumération des
verbes d’action, comme la métaphore « moche du Coche » qui fait
allusion à la célèbre fable de La Fontaine « Le Coche et la Mouche »,
insistent sur son extraordinaire efficacité, son activité communicative. A
travers ce personnage, Hugo contribue à la création d’un véritable mythe
révolutionnaire. Car le romancier sait aussi captiver et séduire son lecteur en
créant des personnages emblématiques auxquels le lecteur peut s’identifier.
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